Dans quelle mesure l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie a-t-elle influencé les plans de défense des pays de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) situés le long dudit flanc oriental ? D’une part, l’ampleur des violences de masse infligées par la Russie à l’Ukraine depuis 2022 met en évidence la menace à laquelle sont confrontés les membres de l’OTAN en Europe centrale et orientale. S’il subsistait des doutes quant à la propension de la Russie à recourir à la force brutale pour s’emparer de territoires, ceux-ci devraient être définitivement dissipés : son comportement récent clarifie la perception de la menace à tous les niveaux. D’autre part, la Russie est engagée en Ukraine et bon nombre des unités militaires qui auraient autrement été stationnées près de sa frontière occidentale subissent des pertes importantes. Aux dépens de l’Ukraine, qui a payé un lourd tribut pour préserver son indépendance, les membres de l’OTAN pourraient voir s’amenuiser les risques d’une agression russe directe et majeure à court terme.
L’intervention à grande échelle de la Russie en Ukraine n’a pas, selon moi, précipité de changement profond dans les plans de défense des pays situés sur le flanc est de l’OTAN, à savoir les trois pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), ainsi que la Bulgarie, la République tchèque, la Pologne, la Roumanie et la Slovaquie. La raison est simple : ces pays considèrent depuis longtemps la Russie comme étant leur menace extérieure la plus persistante et la plus dangereuse. Depuis 2014 au moins, ils avaient déjà pris des mesures pour améliorer leur sécurité : recapitalisation des armées, augmentation des budgets de défense et renforcement de leurs liens avec les armées otaniennes situées plus à l’ouest. Les décisions prises lors des sommets de l’OTAN après février 2022 ont renforcé des tendances anciennes, qui se dessinaient depuis l’annexion de la Crimée par la Russie et la déstabilisation de la région du Donbass.
Bien sûr, les décisions prises après 2022 ont entraîné quelques changements. L’une des principales leçons concerne la valeur des fortifications et de la connectivité.
Ces développements s’inscrivent dans un contexte marqué par le spectre d’un possible désengagement des États-Unis dans les affaires de sécurité européennes. Bien que le précédent président américain Joe Biden ait fait des alliances militaires un pilier central de sa politique étrangère, son attention à l’Europe a été inégale au cours de l’année 2021. La décision de lever les sanctions contre le gazoduc Nord Stream 2 et l’intention déclarée de mettre les relations russo-américaines sur une base « stable et prévisible » s’inscrivaient dans une stratégie plus large de pivot vers la Chine, qui a peut-être contribué à la décision du président russe Vladimir Poutine d’élargir la guerre contre l’Ukraine le 24 février 2022. Les États-Unis ont déployé environ 100 000 membres de leurs forces armées en Europe pour un certain temps, et ont joué un rôle indispensable dans le soutien à l’Ukraine. Néanmoins, depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier 2025, les États-Unis ont exercé une pression considérable sur l’Ukraine pour qu’elle parvienne à un accord de paix, allant jusqu’à suspendre temporairement leur aide militaire. Les discussions européennes sur la meilleure façon de défendre le continent face à un soutien aussi instable de la part de Washington ont donc pris de l’ampleur.
La communauté européenne de sécurité ne s’est pas prémunie contre un éventuel désengagement des États-Unis. Elle dépend des ressources spatiales américaines ainsi que de leurs capacités en matière de renseignement, de surveillance et de reconnaissance. Une grande partie de l’environnement sécuritaire dépend de ce que l’Ukraine peut accomplir sur le champ de bataille, et de la rapidité et de l’efficacité avec lesquelles les membres européens de l’OTAN peuvent renforcer leurs armées. Malheureusement, une bonne partie de ce que l’Ukraine peut accomplir dépend de la qualité et de la rapidité du soutien militaire et financier qu’elle reçoit de ses partenaires occidentaux, notamment des États-Unis. Malgré tout, l’accentuation des tendances décrites ci-dessus (augmentation des dépenses de défense, recapitalisation militaire et renforcement des liens entre les alliés) place les membres de l’OTAN dans une meilleure position qu’en 2017 dans l’éventualité, peu probable mais plausible, où les États-Unis décideraient de se retirer d’Europe.
Tendances en matière de défense sur le flanc oriental
Avant que la Russie ne lance son invasion à grande échelle de l’Ukraine en 2022, au moins trois tendances en matière de défense le long du flanc oriental pouvaient s’observer. La première est l’augmentation des dépenses de défense sur l’intégralité du flanc, à savoir la partie de l’Alliance qui s’étend des côtes nord-est de la mer Baltique aux côtes occidentales de la mer Noire. Le tableau ci-dessous met en évidence cette tendance en indiquant les dépenses de défense des membres de l’OTAN entre 2014 et 2024. Au cours de cette période, les dépenses de défense ont augmenté d’environ 30 %. Si l’on exclut les États-Unis, ce pourcentage a plus que doublé, atteignant environ 72 %. La contribution des membres du flanc oriental est particulièrement évidente lorsqu’on les isole : leurs dépenses ont augmenté de 193 %. Sans surprise, la plus forte augmentation d’une année sur l’autre a été enregistrée entre 2022 et 2023. Cette hausse a toutefois renforcé les tendances existantes et reflété un nouveau sentiment d’urgence face à l’aggravation du bellicisme de la Russie.
Tableau 1. Évolution réelle des dépenses de défense entre 2014 et 2024 en millions de dollars, aux prix et taux de change de 2015
2014 | 2024(e) | Évolution réelle 2014-2024(e) (%) | |
Bulgarie | 643 | 1 395 | 117 |
République tchèque | 1 683 | 4 567 | 171 |
Estonie | 431 | 944 | 119 |
Hongrie | 1 035 | 3 365 | 225 |
Lettonie | 246 | 1 022 | 316 |
Lituanie | 357 | 1 517 | 325 |
Pologne | 8 557 | 26 839 | 214 |
Roumanie | 2 324 | 5 490 | 136 |
Slovaquie | 832 | 2 118 | 155 |
Flanc oriental | 16 108 | 47 257 | 193 |
OTAN Europe et Canada | 250 340 | 430 112 | 72 |
OTAN total | 910 361 | 1 184 796 | 30 |
Source : OTAN. Les chiffres pour 2024 sont des estimations
Certes, on ne peut exclure que le désengagement des États-Unis sous la présidence Trump soit à l’origine de ces augmentations. Que ce soit en tant que candidat ou en tant que président, Donald Trump a souvent déclaré que les alliés des États-Unis profitaient du système et devaient consacrer beaucoup plus à leurs propres armées. Il a averti que les alliés qui ne paieraient pas leur « juste part » perdraient leur protection. Il s’est attribué le mérite de l’augmentation des dépenses observée dans l’ensemble de l’Alliance, ce qui a incité ses détracteurs à rétorquer que Vladimir Poutine était le principal responsable du renouveau de l’Alliance. Si la reprise de l’agressivité russe a effectivement été le facteur principal, l’effet de la présidence Trump ne peut être écarté, malgré ce que ses opposants voudraient affirmer. Il a en effet suscité des craintes d’abandon, qui ont probablement influencé certaines acquisitions militaires.
La deuxième tendance concerne les efforts déployés par les pays du flanc oriental pour recapitaliser leurs armées. Bien que nombre d’entre eux fussent membres de l’OTAN depuis au moins une décennie avant que la Russie ne déstabilise l’Ukraine en 2014, ils n’avaient pas entrepris de modernisation en profondeur de leurs propres plateformes. Beaucoup conservaient des équipements hérités de l’ère soviétique. Certains avaient sous-financé leurs forces armées en raison de la pression exercée par les réformes postcommunistes et, à la suite de la crise financière de 2008, par les mesures d’austérité. La menace russe étant devenue plus évidente en 2014, plusieurs pays se sont engagés dans un processus de recapitalisation majeure.
La Pologne offre le meilleur exemple. Avant 2022, son réarmement comprenait déjà l’achat de 32 F-35A, la construction de trois frégates de classe Miecznik et le développement du système intégré de défense aérienne et antimissile (qui comprend des systèmes PAC-3B Patriot). Dans le contexte de l’invasion à grande échelle de la Russie, le gouvernement polonais a redoublé d’efforts en annonçant son intention d’acheter, entre autres, 96 hélicoptères d’attaque AH-64E, 48 avions de combat légers FA-50, 2 100 véhicules d’infanterie lourds, 486 lanceurs M142 HIMARS, 632 obusiers automoteurs K9 Thunder et 250 nouveaux M1 Abrams. En tant que membre le plus important et le plus riche du flanc oriental, la Pologne est le pays qui déploie les efforts les plus importants et les plus profonds. Cependant, elle n’est pas un cas exceptionnel. L’Estonie, la Lettonie et la Lituanie ont entrepris une recapitalisation similaire, tout comme la Hongrie et la Slovaquie, pays généralement considérés, à juste titre, comme politiquement proches de la Russie.
La troisième tendance concerne la connectivité croissante entre les membres de l’OTAN au sein du flanc oriental, ainsi qu’entre les armées elles-mêmes. Bien sûr, ces pays étaient déjà liés militairement du fait de leur appartenance à l’OTAN et de leur participation au Conseil de l’Atlantique Nord, sans parler de leur participation à l’Union européenne. Néanmoins, ils ont élargi leurs liens de défense dans plusieurs domaines, afin de répartir les risques et d’améliorer leur interopérabilité. La Présence avancée renforcée – désormais appelée « Brigades multinationales » – annoncée par l’OTAN lors du sommet de Varsovie en 2016 est peut-être la forme la plus tangible de cette coopération. Initialement déployées sous la forme de groupements tactiques multinationaux de la taille d’un bataillon, dirigés par un pays cadre, ces unités militaires ont assuré une présence rotative impliquant une grande partie des membres de l’Alliance en Pologne et dans les pays baltes. À la suite de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en 2022, d’autres groupements tactiques multinationaux ont été formés ailleurs en Europe centrale et du Sud-Est. Lors du sommet de Madrid en 2022, l’OTAN a décidé de porter ces groupements tactiques au niveau de la brigade. La Pologne bénéficie de cette initiative et y contribue en accueillant un groupement tactique près d’Olsztyn et en déployant des forces en Lettonie et en Roumanie.
Les membres du flanc oriental ont également renforcé leur coopération entre eux. Le « Bucharest 9 » est un format qui rassemble neuf membres de l’OTAN de la région afin de coordonner et de promouvoir leurs positions politiques au sein de l’Alliance. En dehors de l’OTAN, le groupe de Visegrad a timidement engagé une coordination en matière de défense, dont le résultat le plus tangible est un groupement tactique de l’Union européenne. L’acquisition de matériel de défense reste un processus unilatéral. Toutefois, avec l’encouragement de l’UE et de l’OTAN, de plus en plus de membres orientaux de l’Alliance entreprennent des projets communs, en particulier depuis 2022. L’Estonie et la Lettonie ont procédé à des investissements conjoints dans la défense côtière et la défense aérienne. La Lituanie et la Pologne ont également l’intention d’améliorer leur coopération industrielle dans le domaine de la défense.
Qu’est-ce qui a changé ?
Les annonces en matière de défense faites depuis 2022 par les pays du flanc oriental s’inscrivent donc dans la continuité. Il est certain qu’un nouveau sentiment d’urgence règne dans toute la région. Les performances militaires de la Russie ont peut-être été entravées par diverses difficultés tactiques et opérationnelles, mais sa capacité à reconstituer ses forces et à infliger des destructions considérables aux villes ukrainiennes a dissipé toute complaisance sur le flanc oriental. La guerre russo-ukrainienne a surtout permis aux institutions de défense nationale, ainsi qu’à l’OTAN dans son ensemble, de tirer des leçons qui risquent de confirmer des idées et plans militaires préexistants (d’autant plus que les données utilisées pour ces derniers sont suffisamment ambiguës pour permettre des interprétations multiples). Toujours est-il que nous pouvons identifier plusieurs enseignements qui témoignent d’un changement par rapport à la planification de la défense pré-2022.
L’un d’eux concerne l’importance des fortifications. L’OTAN s’est explicitement engagée à adopter une posture de défense visant à arrêter les forces russes à la frontière et à défendre chaque centimètre carré de territoire, ce qui aurait pu facilement remettre en cause sa crédibilité si la Russie avait procédé à une annexion territoriale limitée. Or, la théorie opérationnelle qui sous-tend une grande partie de la pensée militaire occidentale est centrée sur la guerre de mouvement, qui prévoit le déplacement de formations militaires afin d’envelopper, d’encercler et de perturber les forces ennemies tout en évitant les batailles directes et décisives. Ces mouvements pourraient impliquer de sacrifier de l’espace pour gagner du temps, permettant ainsi aux forces ennemies de gagner du terrain, au risque de trop étendre leurs lignes d’approvisionnement et de s’exposer à une contre-attaque. Certaines des premières victoires de l’Ukraine en 2022 ont consisté à sacrifier de l’espace pour gagner du temps, mais au prix des atrocités commises par la Russie à Boutcha. Pour les pays baltes, qui sont territorialement compacts et regroupés autour de la mer Baltique, la guerre de mouvement peut être difficile à justifier sur le plan politique et militaire, le risque d’une occupation étrangère prolongée étant encore plus grand qu’à la périphérie de Kiev. La guerre a ainsi rappelé à de nombreux observateurs la valeur des fortifications, et donc de la défense positionnelle des frontières. La contre-offensive très médiatisée de l’Ukraine en 2023 a notamment échoué parce que l’armée russe a eu le temps de créer un réseau dense de tranchées et de points forts minés. Les forces russes, quant à elles, ont subi des pertes importantes en tentant de franchir les lignes défensives ukrainiennes.
Ce type de défense statique n’a guère été pris en compte dans les plans de défense de l’OTAN, même si les murs sont devenus courants sur le plan politique et militaire ces dernières années. Début 2024, cependant, les pays baltes et la Pologne ont présenté des plans visant à mettre en place des systèmes de fortifications destinés à arrêter toute force d’invasion à la frontière. L’Estonie, la Lettonie et la Lituanie ont annoncé la création de la ligne de défense balte, qui prévoit la construction d’un vaste réseau de bunkers près de leurs frontières avec la Russie. De son côté, la Pologne a annoncé la mise en place d’un « bouclier oriental » qui comprendrait des systèmes d’alerte précoce, des structures anti-mobilité, ainsi que des systèmes de guerre électronique capables, entre autres, de contrer les drones ennemis.
Le deuxième enseignement concerne la question des munitions. L’armée russe est fondée sur l’artillerie, et tant la Russie que l’Ukraine ont utilisé des quantités prodigieuses de munitions depuis 2022. À certains moments, l’Ukraine a été confrontée à de graves pénuries, ce qui l’a contrainte à innover en utilisant de petits drones capables de transporter des explosifs avec précision pour atteindre des cibles sur le champ de bataille. L’industrie de la défense bulgare produit régulièrement des munitions destinées à l’Ukraine. La Lituanie et Rheinmetall ont signé une lettre d’intention en avril 2024 pour construire une usine de munitions de 155 mm. La Pologne souhaite également développer la capacité de produire des obus d’artillerie de 155 mm.
Le troisième enseignement concerne le spectre électromagnétique et la guerre électronique. Bien que la Russie n’ait pas été en mesure d’exploiter les avantages qu’elle prétendait avoir vis-à-vis de l’Ukraine, ses capacités de guerre électronique ont causé des problèmes aux forces armées ukrainiennes. Les munitions fournies par l’Occident auraient dévié de leurs cibles en raison du brouillage des unités russes de guerre électronique. L’expérience de l’Ukraine en matière de guerre électronique a convaincu les observateurs de la nécessité de réfléchir clairement à la manière de maximiser et de protéger la connectivité sur le champ de bataille, que ce soit entre les unités nationales, les services militaires, les domaines ou les plateformes elles-mêmes. En effet, en 2023, l’OTAN a approuvé l’adoption d’« opérations multidomaines », qui envisagent la poursuite coordonnée et simultanée d’activités militaires sur terre, sur mer, dans les airs, dans l’espace et dans le cyberespace dans le cadre de sa stratégie militaire.
Les pays situés le long du flanc oriental semblent réagir presque exclusivement au sentiment accru de menace suscité par l’invasion brutale de la Russie. On peut se demander ici dans quelle mesure la politique intérieure devrait entrer en ligne de compte. Plusieurs membres de l’OTAN situés sur le flanc oriental ont des sociétés polarisées, qui ont vu comment des changements de gouvernement peuvent entraîner de sérieux revirements politiques. La Slovaquie en est l’exemple le plus frappant, étant passée du statut de fervent soutien de l’Ukraine à celui de critique virulent lorsque Robert Fico est redevenu Premier ministre en octobre 2023. Néanmoins, même le cas de la Slovaquie doit être nuancé, puisqu’elle consacre toujours plus de 2 % de son PIB à la défense. Soulignant l’impact potentiel sur le déficit public, les dirigeants slovaques actuels ont exprimé leur réticence à porter cette proportion à 3 %, comme l’ont fait d’autres pays de la frange orientale. Néanmoins, la hausse récente des dépenses a permis à la Slovaquie de poursuivre son projet de modernisation en achetant, entre autres, des F-16, des véhicules de combat d’infanterie et des systèmes de défense aérienne avancés. La Hongrie a également augmenté ses dépenses de défense dans le cadre de son programme de modernisation Zrínyi, en achetant, entre autres, des hélicoptères, de l’artillerie, des chars de combat et des avions de combat. Bien sûr, aucun de ces investissements n’aurait beaucoup de sens si, en cas de crise, les gouvernements slovaque et hongrois décidaient de rester en retrait en raison de leurs divergences avec leurs alliés sur la crise sécuritaire européenne. Toutefois, si à l’avenir des politiciens plus atlantistes devaient arriver au pouvoir dans ces pays, ils disposeraient de plus d’options en matière de défense qu’auparavant grâce à ces investissements.
Les arguments financiers avancés par les dirigeants slovaques pour s’opposer à de nouvelles augmentations pourraient être un signe avant-coureur de la politique intérieure à venir dans toute la région. Pour poursuivre le renforcement militaire, il faut trouver des ressources financières. Jusqu’à présent, les pays ont adopté différentes stratégies. L’Estonie, la Lettonie et la Lituanie ont chacune introduit des taxes temporaires sur certains biens et services afin de financer leurs dépenses de défense. Pour sa part, la Pologne a financé ses dépenses militaires par l’emprunt, ce qui soulève des inquiétudes quant à l’impact budgétaire à long terme de cet endettement. Le dilemme entre l’armement et le bien-être social pourrait s’intensifier si ces pays voyaient s’amenuiser leurs perspectives de croissance économique et de gains de productivité, défis auxquels leurs homologues d’Europe occidentale sont déjà confrontés.
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En résumé, en raison de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie, les membres de l’OTAN sur le flanc oriental ont redoublé d’efforts pour améliorer leur position en matière de défense. Ils ont davantage augmenté leurs dépenses de défense, acquis de nombreux équipements, et renforcé leurs liens (entre eux et avec les autres membres de l’OTAN). Plus important encore, la guerre russo-ukrainienne a permis de tirer des enseignements sur les mesures à prendre pour améliorer leurs chances de succès si la situation sécuritaire venait à se détériorer davantage au cours de cette décennie. Ils ont pris conscience de l’importance des systèmes de fortification, des réserves de munitions et du spectre électromagnétique dans les combats intenses qui se déroulent en Ukraine et dans les environs.
Cela ne signifie pas pour autant que les États-Unis ont cessé d’être indispensables à la sécurité européenne. Tous les membres du flanc oriental souhaitent que les États-Unis restent engagés dans la région, voire qu’ils intensifient leurs efforts pour résister à la subversion russe et équiper l’Ukraine de ce dont elle a besoin pour l’emporter sur le champ de bataille. L’ensemble de la partie européenne de l’OTAN reste dépendant de moyens et d’atouts essentiels que seuls les États-Unis sont actuellement en mesure de fournir à grande échelle. Néanmoins, en réalisant ces investissements, les membres de l’OTAN situés le long du flanc oriental démontrent à tous qu’ils sont déterminés à assurer leur propre défense et qu’ils font déjà tout leur possible pour atténuer les scénarios les plus pessimistes.
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